Nature | Hydrologie & géologie des Gorges du Verdon | Réserve naturelle de Saint maurin | Faune & flore du Verdon
Peu de gens s'opposeront au fait de dire que le site des Gorges
du Verdon est remarquable.
Falaises abruptes aux couleurs nuancées, parcelles de verdure
qui se développent sur des balcons naturels, rivière émeraude.
Ce qui est par contre bien moins connu du grand public, c'est
la valeur biologique de ce site unique en Europe. Le terme unique
est important.
La richesse du Verdon tient au fait que des espèces lui sont endémiques, c'est à dire qu'elles n'existent à la surface de notre planète uniquement dans les gorges (ou à proximité immédiate).
Le site étant unique et les espèces étant adaptées à ce site,
elles ne trouvent pas d'autres milieux équivalents à coloniser.
Les espèces endémiques protégées :
Doradille du Verdon
Raiponce de Vilars
Sabline de Provence
Les autres espèces protégées :
Gagée des champs
Gagée des près
Gagée des rochers
Pivoine officinale
Tulipe d'Agen
Tulipe des bois
Scolopendre
Sabline cendrée
Dauphinelle fendue
Polygale grêle
Moloposperme du Péloponnèse
Orpin à odeur suave
Violette de Jordan
Asplenium Jahandiezii - Doradille du Verdon
La convention européenne de Berne l'a inscrite en Annexe I dont l'intitulé est : Espèces de flore strictement protégées. Cela veut bien dire ce que cela veut dire ! Et dans le cas ou cela ne suffirait pas : Elle est interdite de commerce par la Convention Internationale de Washington. Elle est protégée au niveau national et régional. Elle figure dans le livre rouge de la flore menacée de France et dans le livre rouge de la région Provence Alpes Côte D'azur. Bien sûr, elle figure sur l'inventaire des ZNIEFF PACA et la Directive Habitat veille à ce que ses biotopes d'accueil soient protégés.
Cet arsenal juridique n'est pas superflu, il faut bien comprendre que la Doradille découverte par Jahandiez en 1909 existe depuis plusieurs milliers d'années mais seulement entre Castellane et Moustiers Sainte Marie. Sa répartition au sein des gorges n'est pas continue, elle est absente sur de grandes portions du canyon. Aussi quand le biotope est favorable vous pourrez souvent en trouver plusieurs touffes sur quelques mètres carrés donnant l'illusion d'une plante prolifique et abondante. Ne la récoltez pas, prenez là en photo les couleurs dureront plus longtemps qu'en herbier.
Si vous la cherchez, sachez que son identification formelle (surtout si vous êtes néophytes) peut poser quelques problèmes. Vous pourrez la confondre avec la Doradille des fontaines (Asplenium fontanum) à laquelle elle fut rattachée en tant que sous-espèce. Elle s'en distingue essentiellement par ses pennes partiellement soudées au rachis. Les feuilles, très souvent, sont appliquées contre la paroi.
Les feuilles atteignent 10 cm de long, des exemplaires de 3 ou 4 cm ne sont pas rares.
Cette fougère pousse à l'abri du soleil au fond des gorges et profite de quelques infractuosités de la roche pour s'installer. L'ambiance ne doit pas être trop sèche si bien qu'elle ne s'éloigne jamais trop loin du Verdon
Phyteuma villarsii - Raiponce de Vilars
Qui ne serait pas tenté de la cueillir ? Refrénez votre envie et contentez-vous d'observer. Autour du pied que vous avez sous les yeux vous pouvez rapidement constater que la plante n'est pas abondante. De plus, faisant partie de la belle famille des Campanules, sa belle couleur bleue ne tient pas bien en herbier. La photo s'impose et les clichés sont rarement médiocres avec une telle merveille.
Ce Raiponce de Villars se plaît dans des stations rupestres, la littérature spécialisée indique qu'il pousse dans les falaises ombragées, humides. Ce serait alors ignorer le fait qu'on puisse le trouver en exposition plein sud dans des conditions de sécheresse non négligeables.
Cette espèce, en France, ne se trouve que dans la région du Verdon entre Var, Alpes Maritime et Alpes de Haute Provence. On la trouve par contre en Italie ce qui fait d'elle une sub-endémique franco-italienne.
Une espèce très proche existe nommée Phyteuma charmelii, elle se distingue de notre espèce par la dentition de ses feuilles quasiment absente. Cependant des individus intermédiaires existent et bouleversent quelque peu la situation schématique de deux espèces distinctes. Actuellement les botanistes considèrent qu'il est préférable de la rattacher à P. charmelii, cela n'est pas anodin car notre plante perd ainsi son statut de plante protégée sur le territoire national.
Des menaces réelles pèsent sur cette "espèce", outre la cueillette, c'est surtout la destruction de ses biotopes qui la rendent vulnérable. Il est donc nécessaire de connaître avec précision ses localités car une voie d'escalade ou un aménagement de la route peut lui faire un tort considérable. Phyteuma villarsii est inscrit dans la liste des plantes protégées au niveau national, il figure aussi dans l'inventaire des ZNIEFF PACA et dans le livre rouge PACA.
Moehringia provincialis - Sabline de Provence
Cette petite plante d'aspect fragile est fréquente dans les gorges, elle arrive même à pousser sur la roche en bordure de route. C'est une espèce endémique des gorges du Verdon et du Bachelard, ne la croyez donc pas abondante sur notre territoire. Il existe une espèce proche de différenciation délicate, certaines flores anciennes englobaient les deux espèces sous le même nom de M. dasyphylla.
Toute la plante est d'aspect filiforme, on s'étonnerait presque de la trouver dans un milieu minéral si dur. Et pourtant à bien y regarder, elle s'y sent parfaitement à l'aise avec ses racines solidement ancrées dans une fissure. Elle forme, quand elle est bien développée une belle touffe plus ou moins pendante. Les fleurs apparaissent plutôt en juin mais semblent ne pas vouloir se ranger dans ce cadre trop rigide : quelques fleurs seront encore visibles en août, d'autres encore dès le mois de mai. Elles possèdent 4 pétales blancs et sont donc facilement reconnaissables.
La Sabline de Provence est protégée au niveau national, elle ne semble pas menacée directement, le terme d'espèce dynamique lui conviendrait mieux. Malgré tout la pratique de l'escalade fait que certaines populations subissent des dommages, une sensibilisation des sportifs semble nécessaire.
Gagea villosa - Gagée des champs
Les gorges du Verdon sont riches de trois espèces de Gagées.
Ce sont toutes des plantes de petite taille qui fleurissent précocement au printemps, de ce fait elles passent souvent inaperçues.
De plus ce sont des espèces à "éclipses", elles possèdent un bulbe et si les conditions ne sont pas clémentes pour une floraison,
elles préfèrent attendre l'année suivante ce qui rend leur découverte parfois difficile.
Les Gagées ne sont pas faciles à différencier, cette dernière appelée Gagée des champs, se reconnaît à ses pédoncules floraux couvert de poils d'où son épithète latin de villosa.
De plus, elle possède deux feuilles basales contrairement à l'espèce suivante.
L'espèce est en régression sur notre territoire, cela est essentiellement dû au changement des pratiques agricoles et à l'emploi d'herbicide.
La Gagée des champs est en effet présente dans les champs et de ce fait c'est une mauvaise herbe. Heureusement pour elle, elle peut se contenter de friches si la concurrence végétale n'est pas trop forte.
Nous avons la chance d'être une région où l'agriculture n'est pas intensive ; l'espèce, bien que rare, ne semble pas directement menacée et subsiste en de nombreux points qu'il convient de surveiller.
La Gagée des champs est protégée au niveau national.
Gagea pratensis - Gagée des près
Proche de l'espèce précédente, elle s'en distingue par l'absence de pilosité sur les pédoncules floraux et par la présence d'une seule feuille basale. La Gagée des prés égaye les premiers jours de printemps de ses délicates fleurs jaunes, ne vous fiez pas à son nom : dans les prés vous aurez plus de chance de voir la Gagée des champs !
Y perdrait-on son latin ? Cette espèce se plaît dans les pelouses rases même si elles sont rocailleuses.
De petite taille et de couleur claire il faut vraiment la chercher pour la voir, comment se soucier alors de cette espèce ? En France elle est menacée par la destruction de ses habitats, dans le Verdon elle semble pour l'instant tranquille : veillons à ce qu'elle le reste.
Gagea saxatilis - Gagée des rochers
La plus petite des Gagées du Verdon et aussi la plus précoce. Celle-ci est caractérisée par la présence de deux feuilles filiformes partant du bulbe. La Gagée des rochers est traitée différemment selon les auteurs, ici nous nous en tenons à la version classique qui l'admet en tant qu'espèce. D'autres auteurs préfèrent lui donner un rang de sous espèce (G. bohemica subsp. saxatilis), en fait il semblerait, d'après des études récentes, que ce soit simplement une variété de la Gagée des bohèmes dont la morphologie reflèterait les conditions de stress du milieu
(faible teneur en eau et en éléments nutritifs…).
Cette espèce est toujours rare et forme des populations réduites qui prospèrent dans des biotopes où la végétation est rase.
La floraison précoce permet de profiter des rayons de soleil printanier avant que le tapis végétal ne gagne en hauteur.
Dans les gorges du Verdon, les individus de Gagée des rochers découverts à ce jour ne dépassent pas la centaine.
Ils sont tous situés dans une pelouse rase où affleure la roche,
le sol est très superficiel et empêche donc l'installation
d'une végétation concurrente.
Cette espèce est protégée au niveau national.
Paeonia officinalis - pivoine officinale
Certaines plantes sont dotées d'un charme secret, la Pivoine est de celles-ci. Est-ce du à son nom aux sonorités douces et fortes à la fois ou bien tout simplement à ses fleurs que la main serait bien tentée de cueillir ? Cette espèce ne peut être confondue avec aucune autre, c'est un arbuste avec des fleurs grosses comme le poing. C'est la sous espèce huthii qui semble être présente sur la commune de La Palud.
Cette Pivoine est une plante plutôt montagnarde, elle recherche les sous-bois clairs mais peut très bien se contenter de rocailles. Inutile de la chercher dans les gorges, pour le voir il faudra se balader du coté de Chanier. Très esthétique, prenez garde d'être tenter de
la cueillir ; munissez-vous plutôt d'un appareil photo et en mai/juin gravissez les versants. On ne rate jamais une photo de Pivoine !
Cette espèce est protégée au niveau national.
Tulipa agenensis - Tulipe d'Agen
Cette belle Tulipe, d'identification délicate parmi l'ensemble des tulipes rouges, était visible de loin dans la verdure des champs du printemps. C'est en effet une plante que l'on qualifie d'adventice des cultures : une mauvaise herbe en somme.
Hélas, aujourd'hui pour la région du Verdon la Tulipe œil-de-soleil semble avoir disparu. Elle fut signalée à Castellane et a pu exister à Moustiers bien qu'elle n'y fut jamais signalée.
Comme bon nombre de Tulipes présentes sur notre territoire, cette espèce fut introduite en France il y a fort longtemps. Originaire d'Asie, elle accompagna les cultures humaines, vraisemblablement celle de Safran. C'est le Conservatoire Botanique National de Gap-Charance qui conserve les Tulipes qui ont disparues de notre sol, ces dernières n'existent plus qu'en culture, triste destin…
Cette espèce est protégée au niveau national.
Tulipa sylvestris - Tulipe des bois
Cette Tulipe est bien différente de la précédente, son allure est plus gracile et surtout sa fleur est jaune. Par contre elle peut être confondu avec T. australis, qui est bien plus commune mais dont les pétales sont lavés extérieurement de rouge. Les deux espèces sont quelquefois présentées comme des sous espèces selon les auteurs.
La Tulipe sauvage pousse au sein des terres cultivées, mais elle peut aussi se contenter de haies ou de talus. Comme bon nombre de plantes associées aux cultures, c'est le changement des pratiques agricoles qui a sonné le glas de cette espèce. Sur notre territoire elle a déjà disparu des grandes régions agricoles, elle existe toujours en région PACA. Par contre, depuis un bon demi-siècle elle n'a pas été revue à Castellane d'où elle était citée ; s'il est nécessaire de la rechercher, il est aussi raisonnable de la considérer comme disparue.
Tulipa sylvestris est protégée au niveau national.
(observée au printemps 2009 autour du lac de Castillon)
Asplenium scolopendrium - Scolopendre
Cette remarquable fougère se distingue aisément à ses feuilles entières allongées atteignant jusqu'à 50 centimètres, qui lui ont valu le nom de "langue de bœuf". Elle affectionne les milieux ombragés à atmosphère humide, ce qui est peu courant dans notre région ; ceci explique sa rareté.
Les botanistes la connaissent depuis longtemps à St Maurin à l'entré des gorges, site à tous points de vue exceptionnel, mais elle est aussi présente dans quelques ravins descendants vers le Verdon
Arenaria cinerea - Sabline cendrée
On pourrait dire que cette espèce est réservée aux botanistes. Elle fait partie de la famille des Caryophyllacées qui contient un grand nombre d'espèces morphologiquement proches et difficiles à déterminer car il faut prendre en compte un grand nombre de critères. Cependant son allure suffit à la distinguer, cette Sabline possède des fleurs blanches avec des sépales ciliées sur la nervure, la plante est de couleur cendrée.
C'est une espèce endémique de la Haute Provence dont l'abondance semble avoir été surestimée. La Sabline cendrée mériterait une protection nationale.
C'est dans les éboulis fins, parfois dans les pelouses rases que l'on peut trouver cette espèce. De nombreuses stations sont situées en bordure de route et sont donc particulièrement vulnérables.
Delphinium fissum subsp. fissum - Dauphinelle fendue
Les Dauphinelles sont des plantes de grande taille (et grandement toxique comme la plupart des représentants de la famille des Renonculacées !) qui doivent leur nom à la forme d'un de leur pétale qui évoque un dauphin : sacrés botanistes, quelle imagination ! Autre caractéristique de ce genre, les fleurs ont une symétrie verticale (comme les ailes d'un papillon et non comme une étoile). Cette Dauphinelle peut se reconnaître à ses feuilles, qui sont divisées en fines lanières et dont le pétiole enveloppe la tige dans une très longue gaine.
Elle pousse de préférence dans les rocailles, au pied des falaises en situation bien exposée.
De fait de la beauté de ses fleurs bleues, cette espèce est directement menacée par la cueillette sauvage. Ses stations sont situées aux alentours du Pont de Carajuan et sont menacées par l'abondance des promeneurs. Dans toute la région, cette Dauphinelle est toujours rare et en faible effectif qu'il convient de préserver.
Polygala exilis - Polygale grêle
Les Polygalas tirent leur nom de la propriété qu'ils ont de favoriser la production de lait. Le Polygala grêle possède-t-il aussi cette propriété ? Il est si peu commun que ce n'est pas cette espèce qui fera augmenter la production française. Facile à reconnaître, cette espèce croit sur les bords des rivières, de préférence avec des graviers. Les fleurs, que vous gagnerez à observer de près, mesure un peu moins d'un centimètre et sont de couleur rose pâle, elles sont disposées en grappes peu fournies.
Cette plante a été citée de Castellane et il est probable qu'on la trouve un jour plus en aval dans les gorges. Elle est protégée au niveau régional.
Molopospermum peloponnesiacum - Moloposperme du Péloponnèse
Cette grande Ombellifère (sa fleur ressemble à celle du Fenouil) peut atteindre deux mètres de haut et cependant elle n'a pas été revue depuis longtemps. Peut-être que les chamois la connaissent mieux que les botanistes, en effet cette plante affectionne les pentes raides caillouteuses ou les éboulis.
Mis à part sa taille, ses feuilles sont aussi caractéristiques car elles sont profondément
découpées en segments aplatis.
Cette espèce a été citée de Castellane, il y a peu de chance qu'elle ait disparu. Comme c'est le cas dans les alpes Maritimes, il est probable que l'espèce soit sous-observée dans les gorges du Verdon.
Etant inaccessible, ce Moloposperme n'est pas menacé directement par les actions humaines, l'espèce est protégée au niveau régional.
Sedum fragrans - Orpin à odeur suave
Cette espèce a été découverte récemment dans les gorges en une seule localité, sa distribution française était jusqu'alors limitée aux Alpes Maritimes où elle reste rare. Cet Orpin est reconnaissable aux poils glanduleux qui le recouvrent. La plante mesure une vingtaine de centimètre, elle est d'aspect fragile, cassante et les fleurs sont peu nombreuses. Les Orpins sont des plantes grasses, elles stockent l'eau dans leurs feuilles qui, prennent un aspect plus ou moins boudiné.
L'Orpin à odeur suave (les traductions littérales ont toujours de la classe…) pousse dans les fentes de rochers abritées de la pluie. La paroi doit être humide et ombragée. Ces biotopes étant difficiles d'accès, l'espèce ne semble pas directement menacée ; mais en contre partie la présence de cette espèce dans le Verdon est peut-être sous évaluée.
Sedum fragrans est protégé au niveau régional.
Viola jordanii - Violette de Jordan
Cette violette n'est pas très difficile à reconnaître. Sa couleur vert tendre, ses tiges dressées et ses fleurs (inodores…) bleues pâles sont des critères qui pourraient suffire. Cependant, le critère déterminant est la taille et la forme des stipules. Grosso modo pour les néophytes, sur les nœuds supérieurs de la tige on a l'impression que les feuilles vont par 3 : en fait il y a la feuille et deux expansions à sa base (les stipules) qui miment des feuilles. Quand vous l'aurez vu vous comprendrez mieux…
Cette espèce, toujours rare et protégée en région PACA, elle n'apprécie pas les ambiances trop chaudes des milieux méditerranéens ni les ambiances trop froides de la haute montagne. Ainsi on peut la trouver sur les bords des cours d'eau, dans les sous-bois clairs
ou encore en bordure de forêt.La violette de Jordan n'a pas été revue depuis plusieurs décennies sur la commune
de Castellane où elle était signalée. Elle est donc à rechercher.